24 Mai 2023
En matière de rando du vertige, impossible de passer sous silence ce fabuleux "laboratoire de la verticalité" qu'est le versant ouest du petit massif genevois. Chaque fois que je m'y rends, je suis surpris par sa complexité, son ambiance et son originalité ; admiratif aussi devant le travail de prospection et d'équipement de ceux - Suisses ou Français - qui ont défriché depuis la fin du XIXe siècle le moindre centimètre carré. Impossible ici d'espérer trouver du nouveau ! Chaque passage porte un nom, aussi bien sur les sentiers de randonnée classique que sur les plus scabreux. Comme tous les massifs s'élevant au-dessus de grandes villes - Genève et Annemasse en l'occurrence -, il faisait office de terrain de jeu à une époque où les déplacements lointains n'étaient pas simples. Certains ont cru que l'engouement pour les itinéraires escarpés allait ensuite baisser au profit de l'escalade pure qui s’y est rapidement développée, mais en fait, les nombreuses "varappes" du Salève restent toutes très prisées, qu’elles relèvent du domaine de la grimpe ou de la rando du vertige.
Les accidents sont malheureusement fréquents, tout le monde n'ayant pas forcément l'aisance et l'expérience nécessaires pour aborder sereinement ce terrain tourmenté et aérien, et il vaut mieux prévoir un minimum de matériel pour des itinéraires qui comportent souvent des passages très exposés. Pour faire bonne mesure, je commence en évoquant la boucle facile et sans danger qui fait le tour complet du Salève occidental, idéale pour un premier contact.
Mai 2023 : quelques équipements ont été ajoutés ou modifiés, notamment dans le Saut Gonet. Ces informations figurent maintenant dans le topo PDF.
Topo détaillé par simple clic sur le doc PDF ci-dessous :
À lire aussi sur la genèse de la varappe (d'un mot pré-celtique : varapp = rocher) :
Les versants nord-ouest et ouest vus de Collonges-sous-Salève. Ces parois qui s'élèvent au-dessus du Coin (les Varappes) concentrent la plupart des itinéraires classiques et intéressants (voir tracés sur photo suivante).
La boucle violette d’IGN correspond au parcours classique Orjobet-Corraterie-Grande gorge décrit ci-dessous. Pour les autres parcours, mieux vaut se référer à la photo précédente et au doc PDF.
1 - Orjobet - Corraterie - Grande Gorge (tracé blanc sur la photo générale)
Le chemin d'Orjobet est équipé depuis 1905. Les escaliers et les barres de fer se trouvent surtout dessous et dans la grotte.
François Orjobet est le nom du guide qui, en 1779, avait emmené Horace-Bénédict de Saussure à la grotte, connue seulement des locaux.
Ici, on trouve en général beaucoup de randonneurs en extase devant les particularités géologiques du site.
Plus haut, au-dessus du sentier de la Corraterie, on découvre le trou de la Tine, qui est en fait un petit cirque creusé dans la falaise et cerclé par une arche.
Il est possible d'aller dessus en remontant un petit couloir après le trou, ou plus simplement en venant de la route du plateau depuis la Bouillette.
Des voies d'escalade se trouvent à l'intérieur de l'arche. De toute façon, au Salève, il y a des voies partout. C'est là qu'est née la "varappe".
Outre le trou de la Tine, visible ici à droite, le sentier de la Corraterie offre un balcon spectaculaire sur la plaine genevoise et le lac Léman.
2 - Le Sphinx par les Étiollets - retour par les Étournelles (tracé rouge sur la photo générale)
En haut des Étiollets, la paroi du Fromage, dont les trous permettent une escalade plus facile qu'on ne pourrait le croire.
Avant la montée au Sphinx, on passe devant les grottes de la Mule et de la Table, dans lesquelles on peut pénétrer. Au fond de celle de la Mule se trouve le trou homonyme, qui permet d'arriver là depuis le Saut Gonet ou la Nationale.
Au-dessus et à gauche du cirque des Étournelles, le Sphinx est accessible par cette belle vire. Plus bas, on devine la vire du Bonhomme et la grotte de la Mule.
Petite digression sur la vire du Bonhomme qui domine vertigineusement le cirque des Étournelles. C'est un moyen plus délicat d'accéder au Sphinx.
Une alternative de retour à partir de l'esplanade des Étiollets : les vires Rosselet, dont le passage clé demande de la détermination…
Les vires Bütikofer, qui se prennent juste avant le mur des Limaces, constituent une variante finalement plus abordable que les Étiollets en raison d'un équipement abondant.
Après les vires Bütikofer, un couloir équipé de barres de fer permet de rejoindre le sentier du Chavardon.
3 - Le Sarrot - Saut Gonet (tracé jaune sur la photo générale)
Après avoir quitté le bon sentier de la Grande gorge, il faut traverser à flanc les deux tours du Sarrot par de belles vires.
À droite de la Cathédrale, on traverse la gorge de la Varappe, appelée maintenant la (ou les) Grande(s) Varappe(s). Elle présente un intérêt historique, puisque son nom a servi à désigner l'activité escalade dès la fin du XIXe siècle, après l'ouverture des nombreux passages difficiles de la partie inférieure. La partie supérieure au-dessus des vires du Sarrot est plus facile. On y trouve ce curieux cirque rocheux appelé "le Gazomètre".
Après la Grande Varappe, on arrive sur la vire redoutée du Saut Gonet : déconseillée aux âmes sensibles…
Le passage clé du Saut Gonet a été récemment équipé d'une chaîne que l'on aperçoit sur cette photo de Laurent Dupuis prise en mai 2023.
Au bout de la Lamin, il va falloir trouver le passage secret du trou de la Mule, invisible jusqu'au dernier moment (au-dessus à gauche du personnage).
On tombe ainsi dans la grotte de la Mule. Il ne reste plus qu'à rentrer par les Étournelles, les Étiollets ou Chavardon. Menu à la carte !
4 - La Nationale (tracé bleu sur la photo générale - voir aussi la photo rapprochée sur le doc PDF)
Les vires d'accès ont été balayées par l'éboulement de 2015, et on doit maintenant passer un peu plus haut que la terrasse Schmolitz grâce à de nouvelles cordes fixes. "Schmolitz" est un terme suisse qui désigne un rituel consistant à passer au tutoiement en buvant un verre (du Fendant de préférence). L'éboulement est passé, mais cela n'empêche pas la pérpétuation du rituel...
C'est un peu la quintessence de l'escalade-loisir, jamais difficile, peu engagée, bien équipée et toujours ludique.
La sortie au-dessus de la Boîte-aux-lettres. Reste à trouver et à passer le trou de la Mule pour gagner les itinéraires de descente...
Je remets ici le lien vers mon doc PDF où se trouvent les infos nécessaires à tous ces parcours :