27 Août 2019
En 1977, j'ai descendu la partie supérieure du canyon des Écouges, l'un des plus beaux et des plus célèbres de France. Le canyoning n'existait pas encore vraiment, et mes amis grimpeurs et moi n'avions d'ailleurs pas l'intention de suivre l'eau, mais plutôt d'effectuer une série de rappels sur ses flancs. Quand j'y pense, c'était risqué car, sans connaissance du lieu encore vierge, nous aurions bien pu rester coincés, d'autant plus que nous n'avions que quelques pitons. Mais cela fut fait, au prix d'un passage d'anthologie en grand écart permettant de passer d'un bord à l'autre. Depuis, j'ai peut-être refait 20 fois cette variante "au sec", la rééquipant chaque fois (la dernière fois en août 2019), et je la préfère nettement au classique parcours aquatique, vu le monde qui s'y presse (et je ne parle pas de la partie inférieure...). J'aurai donc attendu 42 ans (!) pour dire que l'on peut descendre un des canyons français les plus encaissés sans même se mouiller les pieds, dans n'importe quelles conditions et à n'importe quelle saison. Je l'ai fait ainsi en hiver (avec de la glace sur les vires du bas, brrrr), ainsi qu'après une crue (c'est spectaculaire et un peu humide, mais ça passe).
Cette descente présente deux autres particularités :
- Elle est assez technique et stressante, et exige donc une bonne accoutumance au vide, ainsi qu'une parfaite maîtrise des manœuvres de corde. Le passage en grand écart demande de la souplesse et de la détermination.
- Elle se déroule en balcon au-dessus du fond du canyon où évoluent de nombreux canyonistes. Il est donc déconseillé de la faire en haute saison, à moins de partir très tôt, ou (conseillé car au soleil) très tard (après 16 h), et en s'assurant qu'il n'y a plus personne (ce qui est possible depuis le parking du haut). Il y a trop de risques de faire partir des cailloux. Mais l'intérêt étant justement de pouvoir profiter du canyon en dehors de l'affluence, il vaut mieux l'envisager en dehors de l'été (1).
Pour toutes ces raisons, vous ne trouverez pas ici de topo, mais je peux donner les infos nécessaires à toute personne qui me le demandera par mail. Il faut bien comprendre que les secours en canyoning sont, comme en spéléo, très complexes et peuvent mobiliser des dizaines de personnes pendant des heures.
(1) L'interdiction du 1er mai au 15 septembre ne concerne que la partie inférieure, mais de toute façon, dans la partie supérieure "au sec", comme on ne touche pas l'eau, on ne risque pas de déranger les poissons..
La partie supérieure du canyon des Écouges vu depuis la route qui relie Saint-Gervais à Rencurel en Vercors ouest.
Depuis la balustrade, deux rappels impressionnants permettent de rejoindre le canyon non loin de ses premières cascades et 20 mètres au-dessus du fond..
Depuis le grand écart qui permet de changer de rive, vue sur des canyonistes qui descendent les premières cascades.
Mieux vaut ne pas être trop petit. Heureusement pour les seconds, le premier peut tirer sur la corde pour les aider.
Avec un peu de métier, on peut se faire balancer pour atterrir sur un bloc (celui à droite du personnage), ce qui permet de rester au sec et d'aller dans l'amas de blocs à droite pour continuer..
C'est l'un des attraits de notre descente que d'avoir ce genre de vue sur les jolis encaissements de la Drevenne, mais il faut précéder les canyonistes, ou passer après, et ne jamais être au-dessus pour ne pas risquer de leur envoyer des pierres.
Ce passage est celui qu'utilisent les canyonistes et qu'on doit prendre si on a raté le balancement sur le bloc pointu. Mais il est dangereux car déversé et très glissant (il y a déjà eu un mort ici). Il ne faut en aucun cas le tenter sans assurage. Il vaut vraiment mieux rester dans les blocs à droite, d'où l'on pourra tirer un petit rappel pour continuer.
Deux petits rappels permettent de prendre pied sur deux vires confortables (moins en hiver : j'étais sur la glace...).
Et le bouquet final : la grande cascade de 70 m. Les canyonistes prennent les rappels en rive droite (et s'amusent à se faire doucher comme ici). Mais pour rester au sec, on utilise des rappels en rive gauche.
La cascade se jette dans une grande et profonde vasque. Les canyonistes, comme celui que l'on voit ici, arrivent dans l'eau, mais nos rappels de l'autre côté permettent toujours d'éviter de se mouiller.