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pascal-sombardier.com

Topos et photos sur la montagne hors des sentiers battus, par l'auteur des Randonnées du vertige

Sardaigne : le Selvaggio Blu

"Le trek le plus engagé d’Europe, le plus sauvage, le plus technique… 7 jours avec bivouacs le long d’une des plus belles côtes de Sardaigne "

Le départ à Pedra Longa. Au fond, la punta Giradili, dont on va emprunter, sous la grande baume, la vire médiane. Une rando classique à faire de toute façon.

Le départ à Pedra Longa. Au fond, la punta Giradili, dont on va emprunter, sous la grande baume, la vire médiane. Une rando classique à faire de toute façon.

Un mythe surfait

« Le trek le plus engagé d’Europe... » En lisant ces lignes, on est forcément intrigué… et attiré si l’on a tendance à distiller un parfum d’aventure dans ses randos. Alors, en 2015, nous sommes allés faire ce fameux Selvaggio Blu en famille et en profitant de la possibilité de se faire apporter l'eau, les vivres et le couchage le soir par des bergers locaux reconvertis en agents touristiques, solution qui évite de porter des sacs de plus de 20 kg. Première surprise : les « bergers », qui se revendiquent comme tels, sont en fait de redoutables hommes d'affaire et demandent une fortune (100 € par jour en 2015) pour une logistique pourtant assez simple à mettre en œuvre, d’autant plus qu’ils guident en même temps des groupes de touristes malheureusement assez bruyants et qui payent 3 fois plus ! Mettre un sac de plus ou de moins dans un 4x4 ou un bateau, cela vaut-il 100 € ? Soit dit en passant, le caractère sauvage du trek en prend un sérieux coup dès lors qu’on s’aperçoit qu’une piste ouverte à la circulation passe non loin derrière l’itinéraire. Certaines étapes arrivent sur cette route ou la croisent. Le premier jour, après la vire Giradili, on rejoint ainsi un site fréquenté par de nombreux badauds, et pour préserver son label « aventure », le tracé contourne la piste par des lapiaz pour revenir dessus au bivouac ! C’est un peu surfait, et annonce l’autre surprise : la plupart des étapes, difficiles à trouver (mais cela fait partie du jeu), se déroulent dans des lapiaz particulièrement acérés et dangereux (rien à voir avec nos petites dalles). Difficile d’éprouver du plaisir sur ce terrain, d’autant plus que les magnifiques vues promises sur la Méditerranée se font rares du fait qu’on évolue la plupart du temps dans un épais maquis. Les cala Sisine et di Luna sont envahies par des touristes venus en bateau, et la liaison pédestre avec Cala Gonone est mortellement ennuyeuse... À part la magnifique vire Giradili de la première étape, il n’y a guère que la portion Mudaloru - Su Feilau qui trouve grâce à mes yeux, et je décris le moyen de la réaliser indépendamment depuis Ololbissi par la Porte d'Urele.

Il faut préciser que tous ces sites sont accessibles facilement et rapidement depuis la piste. Beaucoup de randonneurs procèdent ainsi, car cela évite les problèmes logistiques, le voisinage indésirable et la déroute financière... Certains Tour Operators français ont intelligemment mis à leur programme des parcours partiels, incluant les sites les plus beaux et les plus intéressants. Ou alors, comme font certains sportifs, il faut partir en autonomie complète et quasiment courir pour limiter le trek à 2 ou 3 jours, mais cela ne change rien au caractère désagréable de certaines sections.

Resteront dans notre souvenir ces quelques images de sites lumineux sur lesquels nous sommes retournés à la journée pour en profiter plus sereinement, sans oublier que la Sardaigne renferme d’autres merveilles, y compris dans d'autres secteurs, parfois plus belles encore.

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Voir la carte du secteur avec le tracé du Selvaggio Blu (cliquer sur l'image et attendre quelques secondes pour obtenir la netteté). C'est une carte que j'ai actualisée en ajoutant les axes principaux, les points d'intérêt et en traçant le parcours du Selvaggio Blu, ainsi que l'accès aux grandes arches s'Ozzastru et s'Arcada Manna. En 2023, j'ai rajouté un tracé jaune pour l'accès à la cinquième étape du Selvaggio Blu depuis Ololbissi par la Porte d'Urele.

Attention aux cartes locales qui comportent beaucoup d'erreurs et d'imprécisions. Quant à la Kompass au 1/50 000, bien qu'il s'agisse d'une marque habituellement sérieuse, il y manque les 3/4 des détails. Le Selvaggio Blu n'y est de toute façon pas tracé. Elle donne des indications sur les accès, mais le 1/50 000 est loin d'être suffisant dans un terrain si complexe. Si l'on peut en disposer sur son portable, le plus fiable est finalement OpenStreetMap. La plupart des sentiers y figurent et les noms semblent plus exacts qu'ailleurs.

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Infos supplémentaires observées lors d'autres voyages en mai 2019 et septembre 2023 : les ex-bergers essayent de développer le tourisme sur leur plateau. On peut les comprendre, mais cela n'est pas du goût de tout le monde. On commence à voir fleurir des panneaux (pas toujours compréhensibles) qui indiquent des randonnées à partir de la piste qui relie le Golgo à la cala Sisine. Cette piste a d'ailleurs été nivelée sur 6 km jusqu'à un bar surréaliste installé en plein maquis... En 2023, surprise, le parking du bar, qui est également le départ de plusieurs randonnées, est devenu payant (5 €). Les randonnées ayant pour but des plages utilisent des sections du Selvaggio Blu qui ont été aplanies et balisées. Mais ces balisages sont régulièrement grattés par ceux qui voudraient conserver le caractère sauvage des Supramonte, et je ne peux les blâmer. Il y a une limite à ne pas dépasser dans la surenchère du tourisme à tout prix. Déjà que les compagnies maritimes basées à Cala Gonone déversent quotidiennement des foules en saison sur la plupart des plages... Il faut dire que la côte vue de la mer est absolument magnifique, et qu'on ne profite pas pleinement (loin de là !) de tous ses incroyables reliefs depuis les hauteurs.

Mais le comble me paraît être le train touristique qui fait le tour du Golgo depuis Baunei, comme dans un vulgaire parc d'attraction. Là, je pense qu'une limite a été franchie.

Pedra Longa : la pierre longue qui marque le départ officiel du périple.

Pedra Longa : la pierre longue qui marque le départ officiel du périple.

Sur la vire Giradili, avec une vue plongeante sur la Pedra Longa.

Sur la vire Giradili, avec une vue plongeante sur la Pedra Longa.

L'ovile d'Us Piggius, situé au bout de la vire Giradili, est encore occupé par un berger et ses chèvres. Les oviles sont des huttes construites en branches de genévrier sur un soubassement en pierre.

L'ovile d'Us Piggius, situé au bout de la vire Giradili, est encore occupé par un berger et ses chèvres. Les oviles sont des huttes construites en branches de genévrier sur un soubassement en pierre.

Une des rares possibilités de voir la Méditerranée.

Une des rares possibilités de voir la Méditerranée.

Les Sardes ont une spécialité : faire des chemins avec des branches de genévrier.

Les Sardes ont une spécialité : faire des chemins avec des branches de genévrier.

La cala Goloritze, plus belle vue de dessus que de la "plage"...

La cala Goloritze, plus belle vue de dessus que de la "plage"...

La célébrissime aiguille Goloritze, où l'on peut grimper (personnage rouge au pied).

La célébrissime aiguille Goloritze, où l'on peut grimper (personnage rouge au pied).

Goloritze, site classé à l'Unesco.

Goloritze, site classé à l'Unesco.

Pour sortir de la cala Goloritze, un passage pas facile malgré les branches (fustes).

Pour sortir de la cala Goloritze, un passage pas facile malgré les branches (fustes).

L'ovile Su Runcu 'e Su Pressu. On trouve de nombreuses huttes de berger (ovile ou cuile en dialecte local) de ce genre dans le maquis sarde, souvent en meilleur état.

L'ovile Su Runcu 'e Su Pressu. On trouve de nombreuses huttes de berger (ovile ou cuile en dialecte local) de ce genre dans le maquis sarde, souvent en meilleur état.

Après Mudaloru, le parcours surplombe enfin la mer jusqu'à Su Feilau.

Après Mudaloru, le parcours surplombe enfin la mer jusqu'à Su Feilau.

Sur la vire entre Mudaloru et Su Feilau, on trouve plusieurs cavités comme celle-ci, des lieux parfaits pour le bivouac, et au fond desquels on peut trouver de l'eau. Mais, du fait qu'ils ne sont pas accessibles en 4x4 ou en bateau, ils ne constituent pas des lieux de bivouac "officiels" pour les tour operators...

Sur la vire entre Mudaloru et Su Feilau, on trouve plusieurs cavités comme celle-ci, des lieux parfaits pour le bivouac, et au fond desquels on peut trouver de l'eau. Mais, du fait qu'ils ne sont pas accessibles en 4x4 ou en bateau, ils ne constituent pas des lieux de bivouac "officiels" pour les tour operators...

Plusieurs petits rappels sont nécessaires pour parvenir à Su Feilau.

Plusieurs petits rappels sont nécessaires pour parvenir à Su Feilau.

L'arche inférieure de Su Feilau, dans laquelle on passe pour remonter à Ololbissi.

L'arche inférieure de Su Feilau, dans laquelle on passe pour remonter à Ololbissi.

La descente de l'autre côté de l'arche est quelque peu acrobatique, sur ces fameux "fustes" (branches de genévrier). Lors d'un passage en 2023, ces fustes n'y étaient plus. On fait maintenant un rappel de 20 mètres. La photo est de Laurent Jacquet.

La descente de l'autre côté de l'arche est quelque peu acrobatique, sur ces fameux "fustes" (branches de genévrier). Lors d'un passage en 2023, ces fustes n'y étaient plus. On fait maintenant un rappel de 20 mètres. La photo est de Laurent Jacquet.

Sous l'arche de Su Feilau, cette descente à l'aide de "fustes" laissait des souvenirs. Mais aujourd'hui, ces branches ne sont plus là, et on descend de l'arche en rappel.

Sous l'arche de Su Feilau, cette descente à l'aide de "fustes" laissait des souvenirs. Mais aujourd'hui, ces branches ne sont plus là, et on descend de l'arche en rappel.

Près d'Ololbissi et au-dessus de Su Feilau, vue sur la lame rocheuse que l'on vient de traverser par une belle arche (ce n'est pas celle que l'on voit sur cette photo, qui est plus haute et plus grande).

Près d'Ololbissi et au-dessus de Su Feilau, vue sur la lame rocheuse que l'on vient de traverser par une belle arche (ce n'est pas celle que l'on voit sur cette photo, qui est plus haute et plus grande).

Vue sur le golfe d'Orosei depuis la crique de Su Feilau.

Vue sur le golfe d'Orosei depuis la crique de Su Feilau.

S'architeddu Lupiru, située au bord de la piste à quad qui descend à la cala di Luna, est un véritable chef d'œuvre de la nature. Sans conteste l'une des plus belles arches d'Europe.

S'architeddu Lupiru, située au bord de la piste à quad qui descend à la cala di Luna, est un véritable chef d'œuvre de la nature. Sans conteste l'une des plus belles arches d'Europe.

À travers l'arche de Lupiru, on aperçoit Cala Gonone et la coulée volcanique qui la domine.

À travers l'arche de Lupiru, on aperçoit Cala Gonone et la coulée volcanique qui la domine.

La cala di Luna et ses célèbres grottes.

La cala di Luna et ses célèbres grottes.

J'évoque également le Selvaggio Blu sur d'autres pages de mon site :

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L
Je me disais bien que ce magnifique petit train ne te plairait pas beaucoup . Et pourtant pense à nos vieux jours lorsque , un casque sur les oreilles , nous pourrons profiter de toutes ces merveilles ,que certain élitistes voudraient garder pour eux seuls
Répondre
P
J’avais bien compris, mais de toute façon, si qui tu sais continue à niveler les chemins, tu pourras y faire passer ton fauteuil roulant ((-;
L
Hello . Ce n'était , bien sur , qu'un trait d'humour , et j'espère bien que , même vieux , je trouverais d'autre façons de contempler les merveilles de la nature , que ces excursions touristiques .
P
Peut-être, mais le train ne va qu'au Golgo, ce qui est moyennement intéressant. Les merveilles sont un peu plus loin, et j'espère qu'elles resteront hors de portée du tourisme de masse, même pour les vieux que nous serons un jour (((-: