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pascal-sombardier.com

Topos et photos sur la montagne hors des sentiers battus, par l'auteur des Randonnées du vertige

Sardaigne : l'île mystérieuse

La Sardaigne ne se laisse pas apprivoiser facilement. Les Français la connaissent peu, et lorsqu'ils s'y rendent, ils sont souvent surpris par sa complexité, sauf bien sûr s'ils ont pour seuls buts les destinations touristiques classiques, les célèbres plages ou les villages pour milliardaires de la Costa Smeralda. Cet article et tous ceux de la rubrique "Sardaigne" de ce blog ont pour vocation de démontrer qu'en cherchant un peu plus, on est vite confronté à un environnement sauvage et à un grand nombre de merveilles naturelles qui font de presque toute l'île un spot majeur pour les amateurs de randos insolites et engagées. On y trouve peu de sentiers et encore moins de parcours balisés, le terrain est rarement de tout repos et il n'existe pas de cartes fiables. De plus, comme les Corses, les Sardes possèdent une âme rebelle et indépendante, ce qui peut les rendre attachants... ou détestables. Victime d'addiction après plusieurs voyages, je livre sur ce blog le fruit de ma modeste expérience, en espérant qu'elle sera utile à ceux qui recherchent des sensations inhabituelles.

C'est en fouinant un peu, ou en tombant dessus par hasard, qu'on trouvera de petits coins de paradis comme celui-ci. Mais aucun office du tourisme ne vous les indiquera, et tant mieux.

C'est en fouinant un peu, ou en tombant dessus par hasard, qu'on trouvera de petits coins de paradis comme celui-ci. Mais aucun office du tourisme ne vous les indiquera, et tant mieux.

Le pays des superlatifs

C'est connu, les Italiens ont tendance à présenter leur pays comme il più bello. Ils ont les plus belles montagnes du monde, les plus belles villes, les plus belles femmes, etc. En Sardaigne, c'est pire ! Les plages sont bien sûr les plus belles du monde et font la réputation touristique de l'île. En Europe, le trek du Selvaggio Blu est le plus sauvage, le plus engagé et le plus technique, le canyon du Gorropu est le plus profond, l'arche s'arcada Manna est la plus grande et Lupiru la plus jolie, la Bocca del Pescecane est le plus énorme des tafoni, les grottes sont les plus exceptionnelles et quand on y trouve une grande stalagmite, c'est forcément la plus haute. Toujours en Europe, le Pan di Zucchero est le plus grand "faraglione" (récif)...  Et pour finir, les voies d'escalade sont les plus belles et certaines sont les plus dures. Ça fait beaucoup, mais ce n'est pas loin de la vérité, comme vous le verrez en lisant ce blog.

Sur cette carte, j'ai encadré ou ajouté les noms des sites évoqués dans ce blog, soit sur cette page, soit sur celles dont les liens se trouvent plus bas. La tache verte à l'est figure le Parc national du Gennargentu, qui n'emporte pas vraiment l'adhésion de ses habitants.

Sur cette carte, j'ai encadré ou ajouté les noms des sites évoqués dans ce blog, soit sur cette page, soit sur celles dont les liens se trouvent plus bas. La tache verte à l'est figure le Parc national du Gennargentu, qui n'emporte pas vraiment l'adhésion de ses habitants.

Y a t-il des montagnes en Sardaigne ?

L'île est grande comme les Alpes françaises. Le point culminant - la Marmora (1834 m) - est d'un intérêt limité. De toute façon, le relief de l'île vaut plus par ses extravagances et ses replis cachés que par l'élan et l'altitude de ses sommets. Le granite* que l'on trouve un peu partout est souvent l'occasion d'admirer des sculptures naturelles parfois improbables.

* Grâce à un correspondant géologue - Jean-Yves Cariou, merci à lui -, j'ai appris une chose sur le granite, différent du granit. Granite désigne la roche magmatique à grains qui compose les reliefs si extravagants d'une partie de la Sardaigne, alors que granit désigne un type de roche cristallisée (par opposition au marbre, qui ne présente pas de grains) propre à la construction. 

Tout cela est bien expliqué sur Wiki, à lire ici : https://fr.wikipedia.org/wiki/Granit

Je parlais de l'"extravagance" du relief granitique (ici au Capo Testa).

Je parlais de l'"extravagance" du relief granitique (ici au Capo Testa).

Ou au monte Pulchiana.

Ou au monte Pulchiana.

Les massifs calcaires sont plus localisés. Outre le petit Capo Caccia, l'île de Tavolara ou le Monte Albo (punta Catirina sur la carte), l'énorme karst des Supramonte et du Gennargentu représente l'attraction majeure pour les pratiquants. Les Supramonte culminent au monte Corrasi à 1463 mètres, et s'inclinent jusqu'au bord de la mer, là où chemine le fameux Selvaggio Blu. La sauvagerie de ses vallons est inouïe. C'est un dédale dans lequel il est difficile de s'orienter, mais où l'on trouve de nombreuses curiosités : falaises, aiguilles, crêtes, canyons, lapiaz, grottes, vires, balcons, arches... Parmi ces dernières, quelques monstres frôlent ou dépassent les 40 mètres d'envergure. S'arcada Manna serait ainsi la plus grande arche d'Europe.

Au cœur des Supramonte de Baunei, nous avons mesuré s'arcada Manna à 42 mètres d'envergure. La hauteur est sans doute supérieure.

Au cœur des Supramonte de Baunei, nous avons mesuré s'arcada Manna à 42 mètres d'envergure. La hauteur est sans doute supérieure.

Le Gennargentu et les Supramonte, jugés mystérieux et impénétrables, étaient appelés la Barbaria (devenue ensuite Barbagia) par les Romains qui se sont heurtés à la résistance du "peuple des montagnes" résolu à défendre ses coutumes. Ces "barbares" ont ensuite combattu d'autres envahisseurs, notamment les Byzantins. Ils restent aujourd'hui très indépendants et même réfractaires aux émanations de la bureaucratie italienne, comme par exemple le Parc national du Gennargentu. Les peintures murales d'Orgosolo sont la meilleure illustration de cet esprit anarchiste.

Orgosolo, village situé à l'ouest des Supramonte près de Nuoro, est célèbre pour ses peintures murales qui traduisent le tempérament anarchiste et rebelle des habitants de la Barbagia.

Orgosolo, village situé à l'ouest des Supramonte près de Nuoro, est célèbre pour ses peintures murales qui traduisent le tempérament anarchiste et rebelle des habitants de la Barbagia.

Certaines peintures expriment davantage la nostalgie du passé de cette région qui était essentiellement peuplée de chasseurs et de bergers.

Certaines peintures expriment davantage la nostalgie du passé de cette région qui était essentiellement peuplée de chasseurs et de bergers.

C'est notamment le cas au village d'Urzulei où l'on trouve une vingtaine de peintures de ce style, de véritables œuvres d'art.

C'est notamment le cas au village d'Urzulei où l'on trouve une vingtaine de peintures de ce style, de véritables œuvres d'art.

Cartes et topos

Attention aux cartes papier locales qui comportent beaucoup d'erreurs et d'imprécisions. Les arches et autres sites y sont souvent mal situés et les noms diffèrent d'une carte à l'autre, ainsi que des rares panneaux en place. Quant à la Kompass au 1/50 000, bien qu'il s'agisse habituellement d'une bonne référence en Italie, il y manque les 3/4 des détails. Elle donne des indications sur les accès, mais le 1/50 000 est de toute façon loin d'être suffisant dans un terrain si complexe.

Si l'on peut en disposer sur son portable, le plus fiable est finalement OpenStreetMap avec sa version GPS OsmAnd qui permet de se localiser sur la plupart des itinéraires dont les tracés sont en général assez précis. La pauvreté de la représentation des reliefs et le trop petit nombre de noms restent un handicap, même si ces noms semblent moins fantaisistes qu'ailleurs. On trouvera aussi de nombreux tracés sur Wikiloc, dont ceux de Corrado Conca qui les propose à partir de QR codes sur ses derniers ouvrages.

Les trois ouvrages en photo ci-dessous permettent une approche intéressante de la Sardaigne pour les randonneurs et les adeptes du scrambling. Le Rother "Sardinia" est maintenant disponible en français (en écorchant pas mal de noms propres), et on y trouve les randos les plus classiques ainsi que, curieusement, quelques parcours techniques et engagés (mais assez peu dans le cœur des Supramonte et rien sur le Selvaggio Blu, par exemple). Pour ceux de Corrado Conca, qui est un peu mon alter ego sarde et propose beaucoup d'itinéraires techniques souvent avec des rappels, il faut comprendre l'italien.

À gauche, le Rother, disponible en français depuis 2018. À droite, ce livre de Corrado Conca, déjà ancien, présente des randos du vertige, des itinéraires hors des sentiers battus, des ferratas, des treks comme le Selvaggio Blu...

À gauche, le Rother, disponible en français depuis 2018. À droite, ce livre de Corrado Conca, déjà ancien, présente des randos du vertige, des itinéraires hors des sentiers battus, des ferratas, des treks comme le Selvaggio Blu...

Cet ouvrage de Corrado Conca date de 2020. Malgré le sous-titre en anglais (abseiling = descentes en rappel), il est en italien et souffre des défauts classiques de la production transalpine : trop de textes, pas de cartes et peu de croquis. Heureusement, il renvoie à des tracés sur Wikiloc par QRcode. Corrado a fait plusieurs autres bouquins, notamment sur les via ferrata et les canyons.

Cet ouvrage de Corrado Conca date de 2020. Malgré le sous-titre en anglais (abseiling = descentes en rappel), il est en italien et souffre des défauts classiques de la production transalpine : trop de textes, pas de cartes et peu de croquis. Heureusement, il renvoie à des tracés sur Wikiloc par QRcode. Corrado a fait plusieurs autres bouquins, notamment sur les via ferrata et les canyons.

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Petit lexique : sa, su, s' correspondent à la, le, l'. Le e précédé d'une apostrophe ('e) correspond à de, des. Une scala ‘e fustes est une échelle confectionnée avec des troncs de genévrier pour franchir un mur ou traverser un ravin (très courant). Un bacu est un vallon encaissé, une sorte de canyon, de même qu’une codula. Campu est un plateau et vallata une vallée. Un genna est un col. Cala (pluriel : cale) désigne une plage. Arcada, archittu, architeddu sont autant de mots qui désignent une arche (attention au mot "arcu" qui désigne un petit sommet, de même que bruncu). Une vire est souvent appelée cengia comme dans toute l'Italie, mais on trouve aussi le mot istrada. Grotta, grottone évoquent une grotte, et voragine un gouffre. Ovile ou cuile désignent une hutte de berger. Cairn se dit “uomo di pietra” (homme de pierre. Pluriel : uomini).

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Y aller

- La meilleure période est le mois de mai, avant l'afflux des touristes, même si ceux-ci envahissent surtout les côtes. En été, il peut faire très chaud (46° en août 2023) et la sécheresse s'accentue chaque année. L'hiver est évidemment tranquille, mais tout est fermé et le climat peut être froid, venteux et humide. Reste le pari de l'automne, pendant lequel on peut aussi bien avoir un beau temps stable qu'une succession de déluges.

- Corsica Ferries/Sardinia Ferries met en place de plus en plus de bateaux directs entre Toulon et Porto Torres. Sinon, il faut aller en Italie à Gênes ou Livourne d'où partent de nombreux ferries pour Olbia, Golfo Aranci, Arbatax ou Cagliari, mais cela fait beaucoup plus de kilomètres et n'a guère d'intérêt, car il ne faut qu'une heure pour aller de Porto Torres à Nuoro par une autoroute gratuite. En outre, les abords de Porto Torres méritent quelques arrêts intéressants (notamment le capo Caccia).

Petit conseil : attention à la liaison Corse-Sardaigne : la coquille de noix qui relie Bonifacio à Santa Teresa ne part qu'en l'absence de vent et de vagues et on risque d'attendre, parfois plusieurs jours...

- Dans l'île, il est facile de se déplacer. Les autoroutes sont gratuites et les grands axes sont fluides. Dès qu'on en sort, c'est une autre histoire... Il est même conseillé d'avoir une voiture surélevée pour aller sur les pistes des Supramonte. 

Petit conseil : en voiture, évitez le centre des villes et même des villages (qui sont souvent de petites villes). Les rues sont (très) tortueuses, (très) étroites et souvent (très) en pente.

S'y loger

- Un peu partout, on trouve des B&B moins chers que les hôtels et ils sont souvent de qualité, sauf dans les grandes villes, où l'on risque de se retrouver dans un minuscule appartement avec check in à distance (en plus, c'est cher). Même pour visiter Cagliari, Sassari ou Alghero, il est donc préférable de louer à l'extérieur, dans des maisons traditionnelles où l'accueil est plus chaleureux et où l'on peut se cuisiner son repas.

- On trouve de nombreux campings, même dans des endroits perdus comme le plateau du Golgo. Heureusement, car la terrible sécheresse de 2023 a incité les autorités à interdire le camping sauvage et le bivouac par peur des incendies. Dans les endroits perdus, on ne peut de toute façon pas dormir n'importe où, car des bandes de cochons sauvages agressifs viennent dévorer tout ce qu'ils trouvent. C'est pour cette raison que les organisateurs de treks utilisent des enclos grillagés.

Exemple d'un B&B à Ozieri. Les Sardes ont souvent aménagé une partie de leur maison, ou une annexe, pour accueillir les visiteurs. Certains ont une connaissance de leur pays qui rend le contact intéressant, surtout quand ils parlent français, bien sûr.

Exemple d'un B&B à Ozieri. Les Sardes ont souvent aménagé une partie de leur maison, ou une annexe, pour accueillir les visiteurs. Certains ont une connaissance de leur pays qui rend le contact intéressant, surtout quand ils parlent français, bien sûr.

L'escalade et les via ferrata.

L'île est connue des grimpeurs car elle offre des milliers de voies d'escalade de tout style et dans presque toutes les régions. La qualité est au rendez-vous. Les voies vont de quelques mètres à 700 mètres dans les Supramonte d'Oliena.

Au-dessus d'Oliena, on peut voir les plus grandes falaises de l'île, notamment sur le monte Cusidore (700 mètres de paroi, à gauche), ou sur la punta Sos Nidos (au centre), dans la paroi nord de laquelle se développe "Rolling Stone", la plus longue voie de Sardaigne (1000 mètres). À droite, le monte Corrasi (1463 m), bien que point culminant des Supramonte, reste très facile d'accès.

Au-dessus d'Oliena, on peut voir les plus grandes falaises de l'île, notamment sur le monte Cusidore (700 mètres de paroi, à gauche), ou sur la punta Sos Nidos (au centre), dans la paroi nord de laquelle se développe "Rolling Stone", la plus longue voie de Sardaigne (1000 mètres). À droite, le monte Corrasi (1463 m), bien que point culminant des Supramonte, reste très facile d'accès.

- On trouve de nombreuses voies en granite, et pas seulement au bord de la mer (par exemple au monte Pulchiana), mais surtout au nord et au sud-ouest. Les voies en granite sont souvent "clean climbing" et il faut apporter ses coinceurs.

- Mais c'est le calcaire qui domine. Presque toujours excellent, il offre une palette de voies très variée, principalement dans les Supramonte de Baunei (Cala Gonone, Surtana, punta Giradili...) et dans ceux d'Oliena. Dans le canyon du Gorropu, Hotel Supramonte est considérée comme la grande voie la plus dure d'Europe en raison de sa difficulté (très) soutenue sur 300 mètres (très) fortement surplombants.

La bible en la matière est "Pietra di Luna, escalade en Sardaigne" de Maurizio Oviglia aux éditions Fabula, plus de 1000 pages sur deux tomes, mais en anglais. Sur la photo, il s'agit du topo des voies de trad et de plusieurs longueurs. L'autre volume traite des falaises-écoles et des couennes. À droite, la carte Kompass au 1/50 000 peut aider à se diriger en gros dans l'île, mais pas plus.

La bible en la matière est "Pietra di Luna, escalade en Sardaigne" de Maurizio Oviglia aux éditions Fabula, plus de 1000 pages sur deux tomes, mais en anglais. Sur la photo, il s'agit du topo des voies de trad et de plusieurs longueurs. L'autre volume traite des falaises-écoles et des couennes. À droite, la carte Kompass au 1/50 000 peut aider à se diriger en gros dans l'île, mais pas plus.

Exemple de petite falaise peu connue bénéficiant d'un cadre agréable, d'un rocher de rêve et d'un équipement béton : Monteleone Rocca Doria.

Exemple de petite falaise peu connue bénéficiant d'un cadre agréable, d'un rocher de rêve et d'un équipement béton : Monteleone Rocca Doria.

On trouve une dizaine de via ferrata sur l'île. Certaines utilisent souvent de longues vires et constituent des balades originales. Malheureusement, la plus belle, la ferrata Cabirol, qui dominait la mer au Capo Caccia, a été démontée pour des motifs "politiques".

Les falaises de Monteleone dominent un grand lac. On y trouve aussi une via ferrata.

Les falaises de Monteleone dominent un grand lac. On y trouve aussi une via ferrata.

Au sud de Sassari, seconde ville de l'île, la ferrata di Giorré traverse sur des vires une falaise de près de 2 km de large. On parcourt d'abord la vire inférieure, et on revient quelques mètres au-dessus par la vire supérieure.

Au sud de Sassari, seconde ville de l'île, la ferrata di Giorré traverse sur des vires une falaise de près de 2 km de large. On parcourt d'abord la vire inférieure, et on revient quelques mètres au-dessus par la vire supérieure.

L'histoire et la culture

L'île a connu de multiples péripéties et son histoire complexe ne peut se résumer en quelques mots. Ses origines restent mystérieuses, ainsi que celle du nom Sardinia (Sardegna en italien). Il y a près de 4000 ans, une civilisation inconnue a construit des milliers de tours, si solidement qu'elles sont toujours là. On trouve donc partout des nuraghes, témoins de cette civilisation nuragique dont on ne sait à peu près rien. L'île a ensuite été convoitée ou dominée par les Phéniciens, les Romains, les Byzantins, les Arabes, les Génois, les Pisans, les Espagnols, les Piémontais, avant d'être rattachée au Royaume d'Italie en 1861, mais elle bénéficie d'un statut autonome depuis 1948.

On compte plus de 7000 de ces mystérieux "nuraghes" en Sardaigne et ils posent bien des questions. Quelle est leur origine exacte ? À quoi servaient-ils ? Comment des hommes sans machines ont-ils pu entasser de si énormes blocs ? (Sur la photo, il s'agit du nuraghe situé à côté de la chapelle de Santa Sabina, près de Macomer).

On compte plus de 7000 de ces mystérieux "nuraghes" en Sardaigne et ils posent bien des questions. Quelle est leur origine exacte ? À quoi servaient-ils ? Comment des hommes sans machines ont-ils pu entasser de si énormes blocs ? (Sur la photo, il s'agit du nuraghe situé à côté de la chapelle de Santa Sabina, près de Macomer).

Si la volonté d'autonomie des Sardes a perduré après le rattachement à la jeune république italienne, cela est en partie dû à la déception occasionnée par la période mussolinienne. Le dictateur avait promis la richesse aux Sardes, notamment en développant l'activité minière. Une ville a même été construite de toutes pièces près des plus grandes mines de charbon d'Italie et appelée Carbonia. Toutes les villes du sud-ouest se sont développées, mais la population eut davantage le sentiment d'être exploitée que de s'enrichir, et les mouvements ouvriers amenèrent la fermeture de la plupart des mines. Il ne reste de cette activité que des ruines et des villes fantômes. On peut visiter ces vestiges émouvants, parfois agrémentés de musées ou de fresques.

Vestiges des mines de Fluminimaggiore, transformées en musée.

Vestiges des mines de Fluminimaggiore, transformées en musée.

En conclusion, je dirais que la Sardaigne est à la recherche d'un nouveau souffle. La baisse de la natalité, le chômage, la sécheresse et d'autres facteurs ont occasionné un dépeuplement progressif et le délabrement des villages, qui sont souvent de vraies petites villes. Une opération "maisons à 1 euro" destinée aux jeunes et aux étrangers a séduit près de 10 000 d'entre eux à ce jour, et certains centres historiques retrouvent un peu de vie.

D'autre part, pour compenser la baisse du taux de renouvellement des générations et donc des métiers traditionnels, les Sardes font appel à des travailleurs étrangers. Exemple intéressant : on a fait venir en 2024 une centaine de bergers du Kirghistan.

Quant à ceux qui restent, ils sont tiraillés entre ces métiers et l'attrait du tourisme. Si celui-ci est très développé sur la plupart des côtes, ce n'est pas le cas dans les zones montagneuses, où l'on trouve encore des bergers vivant dans des oviles de branchage. Mais certains se reconvertissent, prenant parfois des initiatives contradictoires avec la préservation d'un milieu dont la sauvagerie constitue précisément l'attrait.

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La richesse et la diversité de la Sardaigne sont telles que je ne vais pas m'étendre ici davantage. Les plus curieux d'entre vous pourront se documenter grâce aux nombreux sites postés sur le Net par des scientifiques, des historiens, des guides naturalistes ou autres... Par exemple, cette page intéressante d'Annick Schnitzler qui aborde aussi bien la botanique, la géologie, l'histoire et la culture que le monde souterrain : https://histoiresdeforets.com/forets-et-paysages/la-sardaigne-entre-montagnes-et-bords-de-mer/

J'ai apporté quelques éléments supplémentaires dans la rubrique Sardaigne de ce blog. À voir en cliquant sur les liens ci-dessous :

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