30 Janvier 2023
Le Vercors recèle des cascades de toutes tailles, mais leur débit est souvent faible. Cela tient sans doute au fait que le massif est moins arrosé que d'autres, qui lui ressemblent pourtant beaucoup (voir Les cascades de Chartreuse), et à un système karstique plus vaste qui absorbe une grande partie des écoulements. Les débits les plus abondants se trouvent d'ailleurs à la sortie des grottes ou dans les gorges. Il en résulte une grande variété allant de simples filets d'eau à des géantes comme Moulin-Marquis ou le Ruzand. Mais, la beauté n'étant pas forcément liée à la taille, on a le droit d'être séduit par de modestes rideaux de perles qui jouent avec la lumière et les couleurs.
Les images qui suivent n'ont pas pour but de dresser une liste exhaustive, d'autant que j'ai fréquenté un certain nombre de canyons à l'époque de la diapositive, ou sans faire de photos faute d'un matériel adéquat. Il manque donc des sommités comme l'Esparron, le Machon, l'Échinard, le Ruissant, le Rio Sourd ou l'Ufert... D'autre part, je n'ai pas toujours eu la chance de faire des photos avec de l'eau dans des canyons réputés pour leur sécheresse chronique, comme le Neyron ou la Combe Garouille. En contrepartie, je dévoile quelques pépites peu connues. Si vous désirez plus d'infos sur certaines d'entre elles, n'hésitez pas à me contacter.
Au-dessus de Claix, la belle cascade d'Allières marque la fin du ruisseau de la Pissarde, qui prend sa source sous le pic Saint-Michel, au sein d'une forêt à laquelle il a donné son nom.
Le ruisseau des Charbonniers se répand en une série de belles cascades sous le chemin qui monte au-dessus de Saint-Paul-de-Varces, vers le col de l'Arc (photo Laurent Jacquet).
Au-dessus de Noyarey, le ruisseau de l'Eyrard saute une barre rocheuse en haut de laquelle a été installée une prise d'eau. Pour accéder à celle-ci, des aménagements sommaires permettent de monter le long de cette belle cascade, dans ce qu'IGN appelle le pas de l'Eyrard.
Le Furon est sans doute le canyon le plus fréquenté de la région. La proximité de Grenoble, la relative facilité du parcours et ses aspects ludiques expliquent ce succès. Mais, pour limiter les accidents, la mairie de Sassenage l'a interdit aux pratiquants non accompagnés d'un professionnel.
À la sortie des gorges du Furon, tout près de Lans, la grotte de l'Olette se présente comme un énorme tunnel qui débouche au bord de la route. La cloche supérieure est occupée par une petite cascade qui, dans ce frigo naturel, gèle facilement, offrant aux "ice climbers" un parfait terrain d'initiation.
Avec ses 150 mètres de hauteur, la cascade du Versoud, qui descend du plateau des Écouges jusqu'au Lignet, est une des plus grandes du massif. La partie inférieure impose un rappel de 70 mètres en plein vide.
La partie inférieure du Versoud est l'occasion d'un petit parcours de canyoning assez court, mais très ludique.
La réputation du canyon des Écouges n'est plus à faire et l'affluence bat des records en saison, malgré un parcours assez technique et un gros risque de crue en cas d'orage.
La partie supérieure du canyon des Écouges se termine par cette belle cascade de 70 mètres. Sous la route, la Drevenne offre ensuite une partie inférieure moins technique et tout aussi belle.
Celle-ci n'a pas de nom et se trouve en forêt près de la Drevenne. Une petite perle si bien cachée que je ne suis pas sûr d'arriver à la retrouver moi-même...
Le canyon du Ruzand s'ouvre au-dessus d'Izeron. Pour les spécialistes, c'est le canyon majeur du Vercors. Il présente deux belles sections très encaissées entre lesquelles une cascade s'écoule presque entièrement en plein vide sur 150 mètres de hauteur (on n'en voit que la partie supérieure sur cette photo). L'accès à son pied est malheureusement difficile et dangereux et l'aventure reste réservée à des canyonistes expérimentés et bien équipés.
La perspective écrase la partie supérieure de cette photo où l'on voit la grande cascade du Ruzand. En fait, la partie au-dessus de la vire est aussi haute que la partie inférieure, soit près de 80 mètres.
Descendu le premier, j'ai pris mes compagnons en photo, mais ils sont si petits qu'on les aperçoit à peine.
La partie inférieure de la cascade du Ruzand impose un rappel de 80 mètres en plein vide depuis la vire visible en haut.
Le pied de la grande cascade du Ruzand. Dessous, on trouve une magnifique cascade encaissée de 83 mètres. Malheureusement, mon appareil a fini sa vie juste avant, dans cette vasque.
Les deux rives des gorges de la Bourne sont riches en écoulements de toutes sortes. Au-dessus de la Valette, près de la Balme-de-Rencurel, la cascade des Rages coule seulement après un gros orage. Rages/orages ? (photo Laurent Jacquet)
La cascade d'Arbois, haute de plus de 200 mètres, s'écoule en plusieurs paliers depuis le plateau de Saint-Julien sur la rive gauche de la Bourne. Elle traverse les vestiges du chantier du canal souterrain long de 3,5 km qui relie le barrage de la Balme à la centrale de Bournillon. Sur une vire près de la cascade, une grande grotte (visible d'en face) servait d'atelier pour forger des outils, d'où son nom de grotte de la Forge (photo Laurent Jacquet).
Sous la route des gorges de la Bourne, à l'aplomb du hameau ruiné du Ranc et le long d'une cascade aux effets ionisants, on peut effectuer un rappel vertigineux de plus de 60 mètres en plein vide jusqu'au torrent.
Cette jolie petite cascade tufière a été révélée par le nouveau sentier "au fil de la Bourne" dont elle constitue le fleuron, du moins dans cette section.
La cascade de Gournier se trouve sur un circuit touristique à gauche de la grotte visitable de Choranche. Le tuf est fragile. Il est donc interdit de l'approcher, de marcher dessus et de la descendre en rappel, comme un certain nombre d'autres cascades du Vercors (voir plus bas, et en note, la formation du tuf expliquée par Jean-Yves Cariou).
La cascade de Moulin-Marquis sort de la grotte éponyme sur le rebord du plateau de Saint-Julien-en-Vercors. Elle se jette presque immédiatement dans une falaise de près de 450 mètres de hauteur pour rejoindre le Bournillon. Peu de cours d’eau ont une vie si brève et si mouvementée
Le débit généralement faible de la cascade de Moulin-Marquis est propice à la formation de tuf (mais le processus est assez complexe. Voir plus bas les explications scientifiques de Jean-Yves Cariou).
Descente à gauche de la cascade de Moulin-Marquis. Au fond, le porche de la grotte du Bournillon, l'un des plus hauts d'Europe avec ses 120 mètres de hauteur.
La cascade Blanche est facilement accessible depuis le village de Sainte-Eulalie-en-Royans. En été, c'est devenu une vraie piscine, ce qui pose des problèmes de surfréquentation et de sécurité. Pour notre part, nous partions grimper dans les gorges de la Vernaison, appelées à ce niveau les Petits Goulets, d'où le casque.
De l'autre côté des Petits Goulets, la cascade Verte est une des plus belles tufières de la région. Elle est donc protégée.
Vraie petite pépite, la cascade du ruisseau de Chaussère descend au nord du Rocher de Monteux, à la limite entre les communes de Beauvoir-en-Royans et Saint-Romans.
À l'entrée du cirque de Combe-Laval, la cascade de Frochet est rapidement accessible par une piste depuis le pont des Chartreux. Au sens propre comme au figuré, c'est un chapelet de perles.
Dans l'Antiquité, les perles étaient appelées "larmes d'Aphrodite", déesse de l'amour et de la beauté. C'est encore plus vrai à l'état liquide.
Le Léoncel est récemment devenu un canyon très populaire, au point de poser des problèmes de surfréquentation. Il faut dire que la balade qui consiste à le remonter est très appréciable en cas de grosse chaleur.
On trouvera la cascade de Dégoutte-Eau dans le ravin de l'Écalon au-dessus de Beauregard-Baret. Plus que l'esthétique, c'est le nom qui m'avait attiré. Sans doute a-t-il davantage un rapport avec les gouttes qu'avec le dégoût, bien qu'on trouve des noms du même genre écrits différemment, par exemple le ruisseau des Dégoutés en Chartreuse, au-dessus de Barraux, ou le Dégoutoir près de Sisteron..
La Druise est le nom donné à la cascade haute de 72 mètres qui se trouve sur le cours de la Gervanne, laquelle coule dans les gorges d'Omblèze. Récemment, la fréquentation de touristes mal équipés était telle que le chemin d'accès a été interdit en pleine saison.
Les cascades de l'Aubaise sont indiquées depuis Archiane en remontant la combe homonyme. Il s'agit plus de toboggans que de véritables cascades.
La grande cascade du Sapet se trouve au-dessus des Nonières, sur le ruisseau de Sareymond qui prend sa source au col de Menée.
Le ruisseau issu du plateau d'Ambel saute la grande barre qui le défend au nord, où il porte le nom de "Saut de la Truite". Son débit est la plupart du temps si faible qu'on n'y voit que quelques traces d'écoulements. Il peut toutefois se réveiller lors de précipitations importantes, généralement accompagnées de fortes rafales de vent fréquentes dans cette région. Il arrive alors que la cascade remonte, comme le montre une des photos du lien posté à la fin de cette page. On aperçoit à gauche le mur des Chartreux, vestige de leur rivalité avec les Cisterciens de Léoncel.
À voir en cliquant sur les liens ci-dessous des précisions sur certains secteurs évoqués qui peuvent faire l'objet de circuits. Beaucoup de ces secteurs figuraient parmi d'autres dans mon ouvrage toujours actuel : Vercors secret.
Le passage du Versoud - pascal-sombardier.com
Le passage du Versoud est l'un des plus improbables du Vercors, qui en recèle pourtant plus d'un. On pourra toujours le chercher depuis la vallée de l'isère, il reste indiscernable, car très é...
https://www.pascal-sombardier.com/2019/01/le-passage-du-versoud.html
Hautes gorges du Furon - pascal-sombardier.com
L'Olette - Grand puits du Furon - baume et pestel de Chasau - arches inférieure et supérieure des Danois Les gorges du Furon (ou gorges d'Engins comme disent les Grenoblois) recèlent quelques ...
https://www.pascal-sombardier.com/2021/02/hautes-gorges-du-furon.html
Les gorges de la Bourne - pascal-sombardier.com
1000 choses à faire et à refaire Je me rends compte aujourd'hui que j'ai fréquenté ces gorges et leurs abords plus que tout autre lieu en montagne. Tout d'abord parce que c'est sur les falaises...
https://www.pascal-sombardier.com/2021/01/les-gorges-de-la-bourne.html
Le canyon des Écouges au sec - pascal-sombardier.com
En 1977, j'ai descendu la partie supérieure du canyon des Écouges, l'un des plus beaux et des plus célèbres de France. Le canyoning n'existait pas encore vraiment, et mes amis grimpeurs et moi ...
https://www.pascal-sombardier.com/2019/08/les-ecouges-au-sec.html
Circuit de la Goulandière - pascal-sombardier.com
Sentier culturel " Au fil de la Bourne " - falaise de la Goulandière - Balme Riendre (option) - la Siva - Grande et Petite Goulandière - belvédère du Ranc - Retour par le pas du Ranc Les superl...
https://www.pascal-sombardier.com/2020/12/circuit-de-la-goulandiere.html
Moulin Marquis au sec - pascal-sombardier.com
Descente en une dizaine de rappels "confort" d'une des plus grandes cascades des Alpes La cascade de Moulin-Marquis est située dans la partie inférieure des gorges de la Bourne. L'eau sort d'une ...
https://www.pascal-sombardier.com/2020/07/moulin-marquis-au-sec.html
À voir le lien ci-dessous à propos de la cascade "remontante" du Saut de la Truite, qu'on devrait signaler aux journalistes parisiens qui parlent des cascades remontantes d'Australie, des USA ou d'Écosse comme si c'était des phénomènes purement exotiques :
Randonnée Les rochers de la truite " Randos Vercors
Une très belle rando dans un environnement superbe. Les plus audacieux d'entre-vous découvrirons l'œil de la truite, les moins téméraires auront l'occasion de se faire les mollets dans le pas ...
http://www.rando-sud-est.com/2019/05/17/les-rochers-de-la-truite/
Dans le même esprit, j'ai précédemment publié ce post à propos du massif voisin/cousin :
Les cascades de Chartreuse - pascal-sombardier.com
L'une des caractéristiques de la Chartreuse se trouve dans le nombre et la taille de ses cascades. Elles ornent en effet tous les versants de ce massif bien arrosé et certaines se déversent par ...
https://www.pascal-sombardier.com/2023/01/les-cascades-de-chartreuse.html
Jean-Yves Cariou, qui figure parmi les quelques centaines de personnes qui me font l'honneur d'être abonnés à ce blog, est agrégé de sciences naturelles et m'a envoyé un long message expliquant la formation du tuf, plus complexe que je l'imaginais. Pour ceux que cela intéresse, je le reproduis ici :
Le tuf lui-même, la roche, est toujours une précipitation de calcite, le minéral principal du calcaire. La calcite se dépose lorsqu’une eau calcaire perd du CO2 : dans ce cas les ions dont elle est riche, bicarbonate (HCO3-) et calcium (Ca2+) précipitent en carbonate de calcium (CaCO3), dont la forme principale est la calcite : 2 HCO3- + Ca2+ → CO2 + CaCO3 (dépôt de calcite) + H2O
C’est ce qui se passe au niveau des sources ou dans les grottes : en débouchant à l’air, d’une part la pression dans le liquide diminue, d’autre part la teneur en CO2 dans l’air est plus faible que dans le liquide, deux facteurs qui favorisent le dégazage de CO2.
Dans les cascades assez vives, la perte de CO2 résulte de l’agitation créée par la chute d’eau. Trois mécanismes, qui ont été nommés « effets de cascade », y concourent à la formation du tuf :
- L’aération : l’augmentation de la surface de l'interface air-eau améliore le dégazage du CO2 ;
- Le « Jet-flow » : le mouvement rapide de l'eau crée des turbulences qui favorisent davantage l'aération, et ainsi le dégazage du CO2 ;
- Les effets de basse pression : la pression de l'eau se réduit à des vitesses élevées, facilitant la libération de gaz dissous.
Ces « effets de cascade » ont été simulés dans des expériences en laboratoire et sur le terrain : chacun accélère ou déclenche la précipitation de calcite (Zhang, Zhang, Zhu et Cheng (2001). Physical Mechanisms of River Waterfall Tufa (Travertine) Formation. Journal of Sedimentary Research, 2001, 71, 205–216. https://pubs.geoscienceworld.
Dans les gours, les effets sont comparables : un petit relief entraîne au départ une accélération du flux, les 3 effets ci-dessus s’ensuivent ce qui provoque un dépôt de calcite faisant « barrière », qui élève le niveau de l’obstacle et ainsi de suite (https://planet-terre.ens-
Remarque : dire « Le débit généralement faible de la cascade de Moulin-Marquis est propice à la formation de tuf » n’est pas faux : cette cascade est, en bien des endroits, couverte de végétaux, et cette fois c’est surtout l’absorption de CO2 par ceux-ci (et probablement aussi par des bactéries photosynthétiques) qui entraîne la perte de CO2 et du coup la formation de tuf. De même pour la cascade Verte, en effet une des plus belles tufières de la région ! Quand le débit de Moulin-Marquis est plus fort, ce sont les effets de cascade qui prennent le dessus sur les causes biologiques.
Causes physiques d’un côté, biologiques de l’autre : les tufs se forment du fait de l’action de facteurs variés, mais toujours conduisant à une perte de CO2 par une eau calcaire.